Auteur > Sue Harrison
Editeur > JC Lattès
Série > La trilogie des Sculpteurs d'ivoire
Genre > roman préhistorique
Date de parution > 1992 aux USA, 1998 en France et pour la présente édition
Titre original > My Sister the Moon
Nombre de pages > 470
Traduction > de l'américain par Marie-Lise Hieaux-Heitzmann
Née en 1950 à Lansing (Michigan), Sue Harrison est diplômée summa cum laude de l'Université d'État du lac Supérieur (Lake Superior State University) avec un BA en langue et littérature anglaises.
Elle a également siégé au conseil d'administration du Lake Superior State University pendant huit ans.
Son premier roman Mother Earth Father Sky (Ma mère la terre, mon père le ciel) a été publié en 1990 et a connu un succès international, acclamé par la critique. Il fait parti de la trilogie Ivory Carver Trilogy. Sa deuxième saga, The Storyteller Trilogy, publiée de 1997 à 2001, n'a pas encore été traduite en français.
- site de l'auteure -
Il y a de cela neuf mille ans, au coeur de l'Alaska, les glaces emprisonnent les îles aléoutiennes. Partout règne la faim. Que compte la vie d'une petite fille pour un père, soucieux d'avoir des héritiers mâles qui seront de futurs chasseurs ? La jeune Kiin n'échapera à ce sort funeste qu'en étant promise, dès le berceau, à l'un des fils de Chagak, l'héroïne dont Ma mère la terre, mon père le ciel avait dressé la passionnante chronique.
Roman haletant, pétrie de mythes et de légendes, Ma soeur la lune poursuit cette saga des origines, ce voyage dans la préhistoire à travers les aventures de Samig et Amigigh, les fils de Chagak, et leur épopée partagée avec la belle Kiin. Celle-ci, ayant survécu à toutes les épreuves, devenue une femme indépendante et courageuse, se retrouvera néanmoins prise à la tragédie du devoir et des sentiments. Amoureuse d'un homme mais vouée à un autre, elle devra traverser cette terre primitive et dangereuse en quête de son destin personnel et la promesse d'une vie nouvelle.
Sue Harrison affirme ici tout son art romanesque, nourri de vastes recherches sur la culture, les moeurs et les langues de nos plus lointains ancêtres. Une oeuvre unanimement célèbrée pour sa véracité et son lyrisme par la presse américaine.
"Chagak était assise à l'entrée de l'ulaq, sur la motte épaisse qui constituait le toit."
Ce 2ème tome se situe 16 ans après le 1er. Chagak et Shaganan avaient donné refuge aux 9 survivants d'une tribu dont l'île avait été engloutie par un raz-de-marée. La jeune femme meurtrie avait fini par accepter la demande en mariage du chef de ces survivants, Kayugh dont elle avait sauvé le nouveau-né affamé, Amgigh, en l'allaitant avec son propre fils Samig.
La suite se focalise sur Kiin, la fille de Coquille Bleue et de l'antipathique Oiseau Gris, que Kayug a empêché de mettre à mort en lui promettant Amgigh en mariage. Pour se venger, Oiseau Gris, frustré d'un enfant mâle premier-né, a refusé de lui donner un nom et décrété de ce fait qu'elle n'avait pas d'âme.
La vie de Kiin, de sa naissance à son adolescence, n'est qu'une succession d'actes de maltraitance, puis de viols lorsqu'elle est en âge d'avoir des relations sexuelles (son père la vend pour une nuit aux commerçants venus faire du troc sur leur île).
Ses seuls moments de réconfort sont ceux passés en compagnie de Samig.
Aussi se sent-elle désappointée quand ses noces avec le frère de ce dernier sont célébrées. Mais Amgigh se révèle un époux tendre et attentif, et sa vie se déroule paisiblement au sein du foyer heureux de Kayug qui abrite également Samig.
Malheureusement, celui-ci les quitte peu après pour rejoindre la tribu de son grand-père maternel Nombreuses Baleines, le chef des Chasseurs de Baleines, et y apprendre leurs techniques de chasse.
Kiin se retrouve alors aux prises avec son frère Qaban, qui la tient pour responsable de sa propre médiocrité et rêve de se venger d'elle...
Parallèlement, le secret de naissance de Samig va être révélé, creusant un abîme entre lui et celui qu'il avait toujours considéré comme son frère.
Ma soeur la lune est presque aussi convaincant que Ma mère la terre, mon père le ciel ; on y retrouve la même poésie, le même souci du détail réaliste qui s'intègre parfaitement au récit et nous donne l'impression de vivre aux côtés de ces Premiers Hommes, à dépecer les phoques sur la plage, à réserver leur graisse, à s'huiler la chevelure... ; l'auteure nous fait ressentir toute la souffrance, le désarroi, la tristesse ou la joie qui étreignent les protagonistes...
Néanmoins, j'y ai décelé quelques défauts : Sue Harrison utilisent certains ressorts du tome 1, à savoir le mariage forcé de l'héroïne, les faux rebondissements concernant ses fuites avortées, la conception d'un (ou des) enfant(s) portant en eux les germes d'une malédiction, ce qui entraîne une certaine lassitude chez le lecteur. Cette impression a sûrement été accentuée par le fait que j'ai lu ce tome-là dans la foulée du premier.
Malgré ces réserves, j'ai littéralement dévoré cette suite passionnante. La figure de Kiin, femme courageuse et déterminée dont la force de caractère se révèle dans l'adversité, est absolument fascinante. Et l'écriture possède toujours sa puissance émotionnelle... Que vouloir de plus ?
Appréciation :
Mes autres avis sur la saga : tome 1 ♦ tome 3 ♦
”... il remarqua que Trois Poissons maigrissait, qu'elle était toute pâle et que son rire était creux.
Ce n'est pas sa faute si elle est ma femme, s'avoua-t-il. D'autres ont choisi pour elle comme pour moi. Epouse Dodue l'avait noté elle-même : dans le noir, toutes les femmes sont pareilles. Parfois, Trois Poissons était Panier Moucheté, parfois Petite Fleur, toujours Kiin.
Cette nuit-là, alors qu'ils étaient assis dans la lumière ténue de l'ulaq, Samig s'aperçut qu'il ne parvenait pas à travailler à ses armes comme d'habitude. Il avait envie de marcher, d'être loin des Chasseurs de Baleines. Ne tenant plus en place, il leva les yeux pour observer les femmes qui cousaient près des lampes à huile. Elles étaient paisibles, le visage d'Epouse Dodue gris, aux traits tirés, Trois Poissons paraissant plus menue, moins redoutable.
Samig fixa Trois Poissons du regard. Savait-elle qu'hier marquait la fin du deuil ? Comptait-elle les jours avec des encoches sur le sol de l'ulaq, comme Epouse Dodue ? Observait-elle la lune comme il le faisait, lui ? Trois Poissons leva les yeux sur lui mais les baissa dès que leurs regards se croisèrent. Ils étaient empreints de tristesse, une blessure dont Samig n'aurait jamais cru qu'elle puisse l'atteindre.
- Femme, dit-il avec douceur.
Elle le regarda et, quand il se leva, elle l'imita. Même Epouse Dodue sourit. Mais Samig n'en avait cure. Qu'elle pense ce qu'elle veut. Peut-être cela soulagera-t-il son chagrin.
Dans l'obscurité de sa chambre, Samig attendit que Trois Poissons s'allonge, mais elle demeura près de lui jusqu'à ce qu'il la pousse délicatement vers les nattes. La main de Trois Poissons se referma sur le poignet de Samig et elle murmura :
- Tu appartiens aux Traqueurs de Phoques et je sais que ton esprit est avec eux.
Samig s'étonna de ces paroles mais, avant qu'il ne pût répondre, elle enchaîna :
- Dans mon coeur, je t'appelle Samig.
Il ne la distinguait pas, mais il tendit la main vers son visage. Je suis pour elle ce que Kiin est pour moi, se dit Samig. Soudain, le coeur douloureux, il comprit.
- Avant que tu ne retournes à ton peuple, ajouta Trois Poissons, donne-moi un fils.
Une surprenante légèreté remplit le coeur de Samig. Son épouse l'avait libéré, ne demandant de lui pas plus qu'il ne voulait donner. Et, comme il l'allongeait sur le dos, dans le noir, Trois Poissons fut Trois Poissons.
(page 285-286)
Ma 11ème participation au défi "La Guerre du feu"
Ma 23ème participation au challenge de Myrtille - inspiration des contes et légendes amériediens
La préhistoire m'attire beaucoup, en particulier à travers cette sage qu'il me tarde de découvrir ! Merci de ta participation ;)
RépondreSupprimerDe rien, Myrtille ! J'espère que sagag saura te toucher autant qu'elle m'a touchée et je serai ravie de lire ton avis !
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