vendredi 30 juin 2017

Le Roi de Fer de Maurice Druon - Les Rois Maudits, tome 1


"Un tronc entier, couché sur un lit de braises incandescentes, flambait dans la cheminée."
Le Roi de fer, premier volume du cycle, a pour figure centrale Philippe IV le Bel, roi d'une beauté légendaire qui régnait sur la France en maître absolu. Tout devait s'incliner, plier ou rompre devant l'autorité royale. Mais l'idée nationale logeait dans la tête de ce prince calme et cruel pour qui la raison d'Etat dominait toutes les autres.
Sous son règne, la France était grande et les Français malheureux.
Les Rois Maudits est l'une des fresques historiques les plus enthousiasmantes, les mieux écrites, que j'ai lues jusqu'ici, avec Fortune de France de Robert Merle ! Le Roi de Fer, qui jette les bases de la saga, est un roman brillantissime, qui nous immerge totalement au temps du roi Philippe le Bel, durant la dernière année de son règne, en 1314, laquelle clôt sept années passées à abattre le puissant Ordre des Chevaliers du Temple, dernier pouvoir à lui tenir tête. Jacques de Molay, le Grand Maître, vient enfin d'avouer sous la torture toutes les infamies imputées à sa milice.
Maurice Druon prend pour point de départ à son heptalogie la légende selon laquelle Jacques de Molay aurait lancé une malédiction au moment de son exécution à l'encontre de ceux qui ont œuvré à sa chute, ainsi qu'à l'encontre de leurs héritiers. On ne peut oublier la fameuse scène du bûcher d'où le vieil homme, possédé par une colère enragée, prononce à travers les flammes qui le ravagent ces paroles saisissantes :

« Pape Clément !… Chevalier Guillaume !… Roi Philippe !… Avant un an, je vous cite à paraître au tribunal de Dieu pour y recevoir votre juste jugement ! Maudits ! Maudits ! Maudits ! Tous maudits jusqu'à la treizième génération de vos races ! »
(page 113)

Deux autres fils conducteurs viennent interagir avec l'intrigue principale, voire l'influencer : la rivalité pour la succession d’Artois entre Mahaut d’Artois et son neveu Robert d’Artois et l’idylle amoureuse entre le banquier Guccio Baglioni et la noble Marie de Cressay (même si pour l'instant, cette dernière intrigue ne semble pas interférer avec l'Histoire, mais patience, les pièces du puzzle se mettent doucement en place !^^).

L'auteur réussit l'exploit de brosser toute une galerie de personnages historiques au caractère varié très crédibles : le roi Philippe, majestueux et implacable, son frère Valois vaniteux et brouillon, ses fils aînés et puînés fades et médiocres, les serviteurs de la Couronne Marigny et Nogaret loyaux mais plus royalistes que le roi lui-même, son cousin Artois truculent et revanchard, sa tante Artois calculatrice et autoritaire, Tolomei le banquier siennois rusé et opportuniste... D'ailleurs, peut-être que cette profusion de protagonistes pourra gêner au début le lecteur qui découvre seulement ce pan de notre histoire, et qu'il aura besoin d'un certain temps avant d'assimiler les identités et les intérêts privés de chacun. Car deux clans gravitent, complotent et intriguent autour du roi : d'un côté le parti des légistes et des tenants d'un état réformateur regroupant Marigny, Nogaret, Philippe de Poitiers, fils cadet du roi, Louis d'Evreux demi-frère du roi ; et de l'autre côté le parti des barons, favorables au retour d'un système politique traditionnel et féodal réuni autour de Charles de Valois, Louis de Navarre et Charles de Bigorre fils du roi, et Robert d'Artois.

On sent que Maurice Druon s'est beaucoup documenté,  non seulement sur la situation géopolitique de la France médiévale mais également sur la vie quotidienne de ses habitants (armement, nourriture, hygiène, vêtements, éclairage, système de chauffage...), si bien que l'on se sent complètement immergé dans l'histoire. Cette documentation n'est jamais pesante mais se fond au contraire très naturellement au récit dans lequel aucun détail n'est négligé, jusqu'au vocabulaire médiévisant.

Malgré les drames humains qui se jouent (la chute des Templiers, la chute des trois brus du roi provoquée par Robert d'Artois pour récupérer son comté, les malheurs conjugaux de la reine d'Angleterre), certaines scènes et certains dialogues sont vraiment très drôles : par exemple, la scène du conseil où le roi ne cesse de rabrouer son héritier d'un sec «Taisez-vous, Louis !» suite à ses interventions toutes plus idiotes les unes que les autres ou la scène entre Mahaut et Robert d'Artois, accouru lui annoncer l'arrestation de ses filles et de sa nièce.

- ... je veux qu'elle [Mahaut] aide à sa ruine en allant braire devant le roi, et je veux qu'elle en crève de dépit.
Lormet baîlla un bon coup.
- Elle crèvera, Monseigneur, elle crèvera, soyez-en sûr, vous faites bien tout ce qu'il faut pour cela.
(page 201)

Chaque phrase, chaque mot fait mouche. L'auteur sait comme personne renvoyer ses personnages vers la médiocrité, la vanité ou la solitude de leur vie en une formule définitive.
Les portraits qu'il brosse sont criants de vérité. Ainsi, Philippe le Bel est décrit comme un roi dur et majestueux, insensible à l'amour, même filial ; et pourtant, il souffre parfois de cette distance qu'il a lui-même instaurée. Mais pour la grandeur de l'Etat, il a renoncé à tout bonheur personnel !
Les personnages échappent à tout manichéisme, et même parmi les plus cruels ou les plus retors, il y a quelque chose en eux qui nous touche ou nous empêche de totalement les vouer aux gémonies.
Ainsi, Marguerite de Navarre, qui tondue et revêtue de sa robe de bure, trouve encore la force de répondre crânement à sa belle-sœur :

«Moi, si je n'ai pas eu le bonheur, au moins j'ai eu le plaisir, qui vaut toutes les couronnes du monde, et je ne regrette rien !»
(page 226)
On ressent toutes les émotions, tous les doutes, toutes les envies rentrées ou sursauts d'orgueil des personnages, tant les mots utilisés par l'auteur sont justes et précis.
Bref, un véritable régal !

En bref :

Les + : un contexte historique extrêmement bien resitué et exploité ; des personnages réalistes et captivants ; un style efficace et des dialogues savoureux
Les - : aucun à mes yeux
 "Frère Renaud s'approcha pour lui fermer les yeux. Mais  les paupières qui n'avaient jamais battu se relevèrent d'elles-mêmes. Par deux fois, le grand inquisiteur essaya vainement de les abaisser. On dut couvrir d'un bandeau le regard de ce monarque qui entrait les yeux ouverts dans l'Eternité."
(sources : Wikipédia)

Maurice Druon, né le à Paris et mort le , est un écrivain et homme politique français. Maurice Druon s'engage dans la Résistance et rejoint Londres en janvier 1943. Attaché au programme « Honneur et Patrie » de la BBC, il écrit alors avec son oncle Joseph Kessel les paroles du Chant des Partisans, que met en musique Anna Marly.
Après la guerre, il devient un homme de lettres à succès avec Les Grandes Familles (Prix Goncourt 1948) et surtout la saga des Rois maudits, roman historique en sept tomes publiés entre 1955 et 1977 et que l'adaptation télévisée fera connaître à un très large public. Il est élu à l'Académie française en 1966 à quarante-huit ans, et en devient le secrétaire perpétuel de 1985 à 1999. Il a écrit d'autres œuvres — comme Tistou les pouces verts, en 1957, un conte pour la jeunesse —, mais aussi des pièces de théâtre et des essais.
Gaulliste et engagé dans l'action politique, Maurice Druon a été ministre des Affaires culturelles en 1973-74.

 
Ma 79ème participation au challenge de Lynnae - Philippe le Bel et ses fils et moult personnages historiques
Challenge Moyen-Âge par hérisson
Ma 22ème participation au challenge d'Hérisson -

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dimanche 25 juin 2017

Le Corsaire Rouge de James Fenimore Cooper


"Quiconque sait ce que c'est que le tumulte et l'activité d'une ville commerçante d'Amérique ne reconnaîtrait point, dans le repos qui règnent maintenant dans l'ancien marché de Rhode-Island, une place comptée dans ses jours de prospérité au nombre des ports les plus importants de toute la ligne de nos vastes côtes."
  
Voyageur et marin, James Fenimore Cooper retrace la rude épopée des coureurs de mer et l'aventure exaltante des pionniers du Nouveau Monde. Dans ce livre, il raconte l'histoire du Corsaire Rouge, terrible gentilhomme pirate, avec son orgueil de mauvais ange et son sublime amour pour la patrie.
Je me souviens que j'avais découvert ce roman dans mon enfance avec les éditions Del Duca pour la jeunesse dans une Le Corsaire Rouge - édition Del Duca version abrégée et illustrée (déjà, mon goût pour les pirates !!^^), et je me suis dit que le challenge d'A-Little-Bit-Dramatic pour le mois d'avril (oui, je suis grave à la bourre !) était l'occasion de le redécouvrir dans son intégralité !! J'avais déjà lu un autre livre de Fenimore Cooper, Le Dernier des Mohicans, que j'avais beaucoup aimé, aussi espérè-je tirer le même plaisir de lecture avec ce fameux Corsaire rouge ! Malheureusement, si la (re-)lecture fut effectivement plaisante, elle ne m'a pas transportée autant que je l'attendais, loin de là ! Pour tout dire, je ne me souvenais plus que des moments forts du récit (que je ne peux développer sous peine de spoiler), or, avant d'en arriver là,  il faut en passer par une trèèèèèèèèèès longue mise en place de l'histoire, mettant en scène des personnages que l'on ne retrouvera plus du tout par la suite !

L'auteur entretient longuement le mystère autour du Corsaire rouge en ne nous le présentant qu'à travers le regard des autres et le prisme déformant des rumeurs. Quelle part de vérité renferment-ils ?
Le Corsaire Rouge est mentionné pour la première fois par un vieil homme qui dit avoir beaucoup voyagé dans sa jeunesse et qui le décrit comme «un brigand altéré de sang et de rapine».
Et même ensuite, quand le Corsaire entrera véritablement en scène, il gardera sa part de mystères. Son comportement, pouvant basculer d'un extrême à l'autre, confirme certains dires à son propos ; en tout cas, il nous interpelle et nous fait nous perdre en conjectures. 

D'une manière générale, l'intrigue est construite sur un écheveau de faux-semblants, touchant la plupart des personnages. Le Corsaire Rouge se fait appeler capitaine Heidegger mais on sait que ce n'est pas son vrai nom. Le narrateur lui-même, Harry Wilder, ne semble pas être ce qu'il affirme ou tente de faire croire auprès des autres. Est-il d'ailleurs vraiment Harry Wilder ? Quel motif impérieux l'a poussé à accepter d'entrer au service du renégat ? Nos doutes descendent jusqu'à la gouvernante qui tressaille en voyant le Corsaire rouge, accréditant l'hypothèse qu'elle l'a déjà rencontré dans une vie antérieure ! Et que dire du serviteur d'Heidegger, Roderick, aux airs parfois si égarés et aux manières étonnamment délicates ? 
Comme on le voit, chacun cache un secret qui ne sera révélé qu'à la fin. Personnellement, j'ai trouvé la révélation de ces secrets assez convenue et/ou capillo-tractée ! Peut-être que pour les lecteurs de l'époque, ces coups de théâtre ne soient surprenants, mais j'ai eu l'impression de les avoir vu déjà traités cent fois !
Je dois dire qu'une histoire axée essentiellement sur le Corsaire rouge et les raisons qui l'ont poussé sur le chemin de la piraterie m'aurait davantage plu !

Par contre, l'auteur excelle dans la description de cet univers marin, l'utilisation des termes techniques. On voit qu'il maîtrise son sujet, et pour cause, il a été marin dans sa jeunesse ! Du coup, cela donne un côté très authentique et épique à ce voyage sur mer, aux sensations que l'on peut éprouver à contempler l'horizon ou essuyer une tempête, au fracas des combats...

Dommage que la lecture soit entachée par des clichés extrêmement agaçants sur les Noirs, qui sont désignés sous les mêmes termes répétitifs, comme par exemple «simplicité naïve». Nul doute qu'à l'époque ces affirmations ne devaient pas être choquantes mais pour un lecteur du XXIème siècle, cela est très crispant !

Dernière réserve : l'édition renferme beaucoup de coquilles ; de plus, des mots sont à maintes reprises accolés et il manque parfois des sauts de ligne entre les parties dialoguées et narratives.


En bref :

Les + : des connaissances sur le milieu maritime  très pointues ; un Corsaire rouge énigmatique et charismatique ; un style d'une très grande qualité littéraire
Les - : une mise en place de l'histoire très longue ;  quelques facilités narratives ; des révélations stéréotypées et prévisibles
(sources : Wikipédia)

James Fenimore Cooper, né le à Burlington dans le New Jersey, est le fils de William Cooper, juge et membre du Congrès pour le comté d'Otsego, issu d'une famille émigrée d'Angleterre en 1679.
Après une scolarité à Albany et New Haven, Fenimore Cooper entre à l'université Yale à treize ans, il reste ainsi le plus jeune étudiant jamais entré dans cette université. Trois ans après, il s'engage à 17 ans, dans la marine américaine. En 1811 il se marie avec Susan Augusta De Lancey, et met fin à sa carrière de marin, il s'installe alors dans le comté de Westchester (État de New York).
Son premier roman Precaution (1820) passe inaperçu, mais très rapidement, son deuxième roman The Spy (L'Espion, 1821), rencontre un grand succès. Le Dernier des Mohicans (1826), son roman le plus célèbre et deuxième des cinq ouvrages composant le cycle des Histoires de Bas-de-Cuir, a connu de nombreuses rééditions. Fenimore Cooper a écrit de nombreux romans sur la mer, tel The Waterwitch (1830). Mais son œuvre est de qualité inégale et son roman Le Démocrate américain (1835) lui vaut un procès.
De 1826 à 1833, il séjourne en Europe pour donner une meilleure éducation à ses enfants. À Paris, il publie des ouvrages, dont The Red Rover et The Water Witch et se lie au peintre Samuel Morse et au héros de l'Indépendance américaine, Gilbert du Motier de La Fayette. De retour aux États-Unis, il se réinstalle dans la maison familiale de Otsego Hall, à Cooperstown.
En mai 1839, Cooper publie son History of the Navy of the United States of America. Il meurt le à 62 ans d'hydropisie, sa femme Susan ne lui survit que de quelques mois ; ils sont inhumés au cimetière de Christ Churchyard, à Cooperstown, auprès de William Cooper.
Challenge "Un classique par mois"
Challenge organisé par Pr Platypus (2/12)
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Challenge organisé par A-Little-Bit-Dramatic (4/12)


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vendredi 23 juin 2017

Dans l'Ombre de la Guillotine d'Eve Terrellon



"Depuis le matin, une pluie fine et pénétrante tombait sur la ville."
  
À l'aube de la Révolution française, Adrien de Sarnas se voit renvoyé du collège où son frère espérait le soustraire à la cruauté de leur père. Le jeune homme vient également de se découvrir atteint par un mal incurable dont la progression insidieuse le terrifie, et qui à terme le laissera infirme. Obligé de rentrer dans son château d'Auvergne, il décide de cacher son état au vicomte de Sarnas.

S'engage alors une partie où les non-dits et les faux semblants vont justifier les pires dérives entre un père et ses deux fils. Mais les apparences sont parfois trompeuses, et la révélation des secrets pas toujours bonne à entendre. Tandis que l'Histoire en marche le rattrape, Adrien est plongé contre son gré au sein de la révolte populaire. La colère gronde parmi les paysans et elle emporte les châtelains vers un destin aléatoire où jalousies, vengeances et opportunismes s'entrecroisent.
Vu mon goût pour les ouvrages ayant trait à la Révolution française et vu la beauté de la couverture, je n'ai pas pu m'empêcher de pré-commander le roman il y a quelques semaines. D'autant que j'avais beaucoup apprécié les deux premiers tomes de la saga Les Dames de Riprole de l'auteure et que j'avais hâte de retrouver sa plume. Donc, aussitôt tombé dans ma liseuse, aussitôt commencé, et lu en quelques heures !

Nous suivons ici la destinée d'Adrien de Sarnas, jeune provincial de dix-sept ans,  à Paris, au collège où l'a envoyé son frère aîné, Henri, pour, comme l'indique la quatrième de couverture, le soustraire à la cruauté de leur père. Arrogant et solitaire, le jeune noble est isolé par ses camarades de classe, mais il ne semble pas souffrir outre mesure de cet ostracisme, d'autant qu'un souci de santé le mine et l'angoisse, et que rien ne pourra, comme il l'apprend lui-même au début du roman, entraver l'avancée de sa maladie, devant le laisser à terme, complètement dépendant des autres. Cette perspective le terrifie, évidemment, mais ce sentiment est encore amplifié par la réaction qu'aura le vicomte de Sarnas à l'annonce de cette terrible nouvelle. Car le père d'Adrien et d'Henri est un père abusif, qui les maltraite aussi bien physiquement que psychologiquement.

Comme vous l'avez sans doute deviné, la romance n'a qu'une part infime dans L'Ombre de la Guillotine, qui met plutôt l'accent sur les relations conflictuelles, éminemment toxiques, entre un père tyrannique et brutal et ses enfants. D'une manière générale, cette situation de maltraitance est bien traitée, même si parfois le lecteur aurait aimé que la psychologie des protagonistes soit davantage développée, voire abordée d'une manière légèrement différente (les divers secrets familiaux ne seront dévoilés que tardivement et parcellairement si bien que les réactions du vicomte apparaissent parfois outrées voire incompréhensibles) car le père va vraiment très loin dans sa violence !

Il y a quelques scènes invraisemblables /!\Attention spoiler/!\ (celle où Henri laisse Adrien dans son cachot juste après l'avoir retrouvé et alors qu'il se trouve dans un état pitoyable, celle où Elisabeth l'appelle sous son vrai nom mettant sa vie en danger)/!\Fin du spoiler/!\, sûrement motivées par l'auteure pour donner à son histoire une direction bien précise, mais ces facilités narratives donnent un sentiment artificiel.

Adrien de Sarnas est un personnage à la fois attachant et agaçant. Attachant car on compatit à son handicap et aux violences qu'il subit de la part de ce père complètement dénaturé. Par contre, son inconséquence est tout bonnement stupéfiante. Adrien n'apprend jamais de ses erreurs, il les répète même ! On comprend qu'il tienne à son indépendance et que sa fierté le pousse à se comporter comme s'il n'était pas devenu infirme, mais ce qui ressort davantage, c'est son côté égoïste qui n'hésite pas à mettre en danger son frère aîné ! Malgré tout, Adrien reste touchant, et sa farouche volonté n'en est que plus admirable, surtout au vu des nombreux sévices qu'il a subis et qui auraient pu le briser à jamais... J'ai également apprécié qu'il n'apparaisse pas comme le gentil petit noble éclairé, mais qu'il conserve cette morgue de caste, aussi bien vis-à-vis de sa nourrice, à laquelle il est pourtant très attaché, que des "manants"vivant sur les terres de son père. Cela n'en rend sa personnalité que plus complexe et intéressante.

Concernant l'édition, il y a plusieurs fautes d'orthographe, et parfois il manque même des mots.

En bref :

Les + : des thèmes intéressants et poignants ; un contexte historique bien reconstitué ; un personnage principal échappant à tout manichéisme
Les - : quelques facilités narratives ; la complexité psychologique du père pas assez développée
Installée depuis de nombreuses années dans le Berry, Eve Terrellon a d'abord exercé dans le cadre de l'insertion professionnelle avant de créer sa petite entreprise de gardiennage d'animaux. Elle se consacre aujourd'hui pleinement à l'écriture.
En 2013, La Colline de l’oubli, romance traitant de la transsexualité dans un contexte de western historique, et La Petite Fée de Noël, romance plus légère mâtinée de paranormal et de fantasy voient le jour.
Défi Le siècle des Lumières 
Défi Le siècle des Lumières (8/36)

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vendredi 16 juin 2017

Sang d'Ombre, intégrale de Nathy



Merci à
et à
 Lune écarlate
pour ce partenariat !
"Angelyne regardait le paysage défiler, le front appuyé sur la vitre du TGV l'emmenant vers sa nouvelle vie."
 
La vie d'Angelyne, jeune humaine née au sein d'un clan d'Ichoriens, verse dans les affres de l'horreur le jour où Thomas refait surface. Sauvée in extremis par Cathal, un Chevalier-Vampire, sa réhabilitation s'annonce lente et douloureuse, d'autant que Swann, le procureur et si particulier frère du prince Edern, la poussera dans ses derniers retranchements. Lui-même brisé et blasé par sa trop longue vie et ses capacités hors du commun, Swann réussira-t-il à surmonter ses redoutables dépendances et son mal de vivre pour mener à bien la mission délicate que son aîné lui confie ? Ce roman sombre et poignant vous emmènera dans les méandres de l’âme de deux êtres torturés que la vie n’a pas épargnés.

En bonus, le spinn-off : Kiss me deadly. Après des années d’absence, Swann, l’enfant terrible de la fratrie princière des Ichoriens, refait surface. En ce début des années 80, l’artiste qu’est le vampire ne pouvait que plonger corps et âme dans le bouillonnement de l’époque punk. Les jeunes se défoncent au rythme de guitares saturées, de mélodies abruptes des Sex Pistols, d’Iggy Pop ou des Clash. L’Immortel exprime à sa manière très personnelle le feu de la rébellion qui lui coule dans les veines. Attention, public averti, certaines scènes peuvent choquer les plus sensibles.

Public averti 18 ans +
Les notes du début du livre m'avaient paru très prometteuses sur la richesse de l'univers imaginé par l'auteure, mais je dois dire que je suis ressortie assez mitigée de ma lecture. Je trouve que le potentiel de l'histoire n'est pas assez exploité, que l'intrigue manque de développement, malgré les quelques cinq cents pages qui nous sont offertes. D'après ce que j'ai compris, Sang d'Ombre fait intervenir les personnages d'un autre roman, Dark-Side, tel que Cathal qui y tient le rôle principal. Je me suis demandée tout au long de ma lecture si l'univers avait été davantage creusé dans Dark-Side et que de ce fait, l'auteure avait choisi de passer sous silence dans ce roman certaines explications. Personnellement, même si cette histoire peut être lue indépendamment, j'avoue que je me suis sentie parfois un peu perdue par le manque d'informations. Et c'est dommage, car l'univers est bien pensé dans l'ensemble.
Ici, nous suivons la rencontre entre l'humaine Angelyne et le prince des vampires, Swann, être profondément tourmenté et craint par les siens pour sa cruauté et son caractère aussi instable qu'imprévisible. Je reviendrai plus loin sur les atouts indéniables de ces deux personnages, mais auparavant, je vais mentionner les points qui m'ont gênée.

Tout d'abord, je trouve que l'on entre trop rapidement dans le vif du sujet, à savoir le kidnapping d'Angelyne et les viols et tortures à répétition qu'elle subit durant de longs mois. J'aurais préféré que l'auteure nous prépare à cette longue descente aux enfers en nous exposant davantage l'histoire du clan d'Angie, la présentation de ses membres et leurs interactions, ce qui nous aurait éviter cette impression d'assister à une surenchère un peu gratuite d'actes barbares !
En outre, après la libération d'Angie,  je n'ai pas toujours compris la réaction des personnages, qui  manquent parfois de subtilité ou de cohérence au vu du traumatisme subi par l'héroïne. Par exemple, l'épisode  de l'étiquette très stricte des vampires : Angie, refusant de la respecter car elle induit un attouchement qu'elle ne supporte plus, s'attire immédiatement des paroles et une attitude violentes de la part de Swann, nous apparaissant totalement inappropriées au vu des circonstances, mais également à cause du peu d'explications données sur ces règles de bienséance. Peut-être est-ce pour mieux souligner le caractère totalement imprévisible de Swann, mais je n'ai guère été convaincue par ce procédé. La brutalité de ce personnage le rend très vite antipathique . Ses réactions sont sûrement dues à sa nature, mais d'une manière générale, elles sont mal intégrées au récit par manque de développement, apparaissant de ce fait peu naturelles.
Autre exemple :  Swann, pour se faire pardonner, impose une pratique sexuelle sado-masochiste à Angie, alors qu'il connaît les traumatismes qu'elle a subis. Même en connaissant la noirceur de son passé, son comportement reste incompréhensible, voire choquant. On pressent qu'il est alors sous l'emprise de sa part sombre, mais l'enchaînement des scènes est trop maladroit pour être convaincant.

Il y a néanmoins plusieurs points positifs : le fait que Swann échappe aux clichés sur les vampires qui fleurissent dans certaines sagas littéraires ou télévisuelles, dépeints comme prétendument cruels mais qui se révèlent au final désespérément mièvres. Ici, la cruauté de Swann est bien réelle, et il n'en dérogera que rarement. Même quand il est animé des meilleures intentions, ses démons le rattrapent souvent, le faisant déraper. Malgré les réserves que j'ai émises à son encontre, Swann n'en est pas moins un personnage fascinant, entouré de mystères. Des débuts de réponses nous sont peu à peu dévoilés sur ses moments d'égarement. D'ailleurs, ses premières confidences donnent lieu à un passage très beau...
De même, le personnage d'Angie est très convaincant : contrairement à d'autres romances que j'ai lues où l'héroïne ayant subi viols et tortures se remet rapidement et de manière totalement invraisemblable de ses traumatismes ; là, Angie met des mois, voire des années à se reconstruire. La plupart du temps, ses réactions ne sont pas en contradiction avec son vécu. On comprend sa souffrance, ses doutes et son rejet vis-à-vis de tout ce qui lui rappelle son agresseur. Malgré tout, l'une de ses réactions va nous faire tiquer ; on comprend sa fuite pourtant mais elle est si peu expliquée et si abrupte que l'on a du mal à y croire. De plus, nous n'apprendrons que vers la fin les motivations secrètes qui la poussent à entretenir une relation avec Swann : cela aurait davantage eu de force si le lecteur l'avait su dès le début, car les réactions de la jeune femme n'auraient pas semblé si incohérentes par moment, gâchant de ce fait un peu la lecture.

La difficulté de leurs relations est un des autres points positifs du roman : Swann ne devient pas un gentil vampire par la magie de l'amour, sa noirceur intrinsèque le pousse à faire souffrir la femme aimée. Mais Angie est suffisamment équilibrée pour refuser cette relation malsaine !

Concernant l'édition et l'écriture, des fautes récurrentes de conjugaison, de grammaire ou d'orthographe, des coquilles, des redondances ou doublons, viennent alourdir la lecture, ainsi que quelques tournures de phrases maladroites. Parfois, le choix de certain mot est incohérent avec la situation, faisant passer les personnages pour inconséquents.

Pour conclure, une lecture en demi-teinte. Je regrette certains choix narratifs de l'auteure, le manque de développement de certaines scènes gâchant le potentiel de personnages pourtant forts et profonds. Dommage que certaines explications ne passent que par les dialogues auxquels est trop fait la part belle, au détriment de l'approfondissement de l'intrigue...Malheureusement, aux bons moments succèdent de mauvais, donnant parfois des scènes ou des dialogues assez gênants, frôlant le ridicule. Mais Swann et Angie resteront des personnages inoubliables...

Je remercie Livraddict et les éditions Lune-Ecarlate pour ce partenariat !
(sources : éditions Lune Ecarlate)

Nathy (née en 19667 et également connue sous le nom de Lunathyque) est graphiste/illustratrice et auteur.
Après des études d'Arts Plastiques, des emplois dans le métier du livre, elle a fini par joindre sa passion pour les images avec sa vie professionnelle en devenant graphiste professionnelle.
L'écriture est longtemps restée une envie inassouvie après avoir cessé d'écrire à l'adolescence. Elle a écrit une première nouvelle, ensuite ce fut les filles du forum The Dark Moon qui l'ont remotivée et soutenue dans cette aventure vers l'édition.
C'est ainsi que sont nées les histoires des Chroniques d'Invictus Tenebrae et qu'Anamorphose a trouvé un éditeur : Rebelle Éditions.

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