lundi 27 février 2017

La guerre de Louise (1914-1921): Parcours de déportés civils en Allemagne de Sylvie Arnoux


Merci à 

Masse critique
et aux éditions  

https://www.entre-temps-editions.fr/
pour ce partenariat !

En découvrant les carnets de guerre de Louise, déportée dans un camp en Allemagne à 17 ans, Sylvie Arnoux a plongé dans le drame vécu par des milliers de civils lorrains en 1914.
Elle nous invite à suivre , de la Lorraine au sud de la France, en passant par l'Allemagne et la Suisse, les parcours croisés de ces femmes, ces hommes et ces enfants.
Loin des récits militaires, les textes et chansons de Louise révèlent la force de vie et l'humour avec lesquels cette jeune femme affronte sept années de guerre.
Je savais que les Allemands avaient occupé les villages français situés sur la ligne de front lors de la Première Guerre Mondiale, je me doutais que cette présence ennemie avait entraîné l'exode de centaines de personnes (c'est ce qu'ont vécu lors de la Seconde Guerre Mondiale mes arrières-grands-parents ardennais jetés sur les routes de l'exode avec leurs neuf enfants), mais ce que j'ai découvert avec stupeur par le biais de ce livre, c'est que certains villages ont été entièrement vidés de leur population, déportée en Allemagne dans des conditions inhumaines.
Louise voit l'arrivée des troupes allemandes dans son village début septembre 1914. Tous les habitants sont entassés dans l'église durant plusieurs jours tandis que les maisons sont livrées au pillage. Le manque d'aération, d'hygiène, de nourriture, entraîne la mort des plus faibles, vieillards et enfants en bas âge, ou encore la folie chez quelques personnes âgées.
Les occupants font régner la terreur, exige des otages et des rançons. Quand ils ne fusillent pas arbitrairement quelques villageois pour couvrir les bavures de leurs soldats.
Les femmes et les enfants sont ensuite séparés des hommes pour être envoyés dans des camps de concentration en Bavière. Ils sont parqués dans des wagons à bestiaux, sans bagages, sans eau, sans nourriture, pour être accueillis à Amberg sous les crachats et les insultes de la foule allemande, remontée contre les Français par les journaux de propagande. Seuls quelques Allemands leur montrent de la compassion.
Dans les camps, ils doivent à nouveau faire face à la promiscuité, à la malnutrition, au manque d'hygiène, à l'air vicié, qui favorisent les épidémies et emportent les plus âgés et les plus jeunes. Certaines femmes meurent en accouchant quand ce ne sont pas leurs bébés. 
Leur quotidien est parfois momentanément amélioré lors de visites officielles  afin de masquer les mauvaises conditions de détention. Quand des reproches sont tout de même adressés aux responsables des camps, ceux-ci se retranchent derrière la réputation de malpropreté des Français [réputation qui a survécu jusqu'à ma génération puisque ma correspondante allemande m'a un jour affirmé que nous les Français nous étions sales, sans aucune raison valable puisque nous nous douchons chez nous tous les jours, mais bon, bref, passons....].
En janvier 1915, la guerre perdurant, les femmes et les enfants valides sont renvoyés en France, mais comme la Lorraine est toujours le théâtre des combats, les déportés sont dirigés vers le sud du pays. Les Suisses, qui voient transiter par leur pays ces cortèges de réfugiés, sont effarés de leur extrême maigreur et de l'expression éteinte de leur regard.
Louise et sa mère  sont logées dans la Drôme. Les réfugiés ne peuvent se déplacer ou travailler sans autorisation. Louise devra attendre février 1916 avant de pouvoir trouver un emploi.
La cohabitation avec les autochtones se dégrade au fur et à mesure de l'afflux de réfugiés. Si au début, les Provençaux se sont montrés accueillants, ils essaient ensuite de s'y soustraire, et le préfet est obligé de recadrer certains maires en leur rappelant le devoir de solidarité de tous les Français, et en menaçant quelque fois de recourir à la réquisition des logements. Mais la cohabitation n'est pas forcément plus aisée entre les réfugiés eux-mêmes qui sont obligés de se partager les pièces d'une même maison.
Avec son travail, Louise et sa soeur aînée, qui est venue les rejoindre, s'intègrent à la population, se font des amis, goûtent aux plaisirs des jeunes de leur âge. Ces connaissances lui seront utiles quand, lors de la Seconde Guerre mondiale, elle vivra un deuxième exode.
La fin de la guerre n'entraîne pas pour autant le retour immédiat des réfugiés car il faut sécuriser les anciennes zones de combat, assurer leur déminage, reconstruire. Le village de Louise ne possède plus une seule maison debout. Louise et sa famille sont enfin autorisées à retourner dans leur village en 1921, dans une habitation provisoire... Mais le père de famille est mort dans le sud, des séquelles de sa déportation comme d'autres Français...

Pour conclure, j'ai été effarée de découvrir ce pan de notre histoire, que je ne connaissais pas du tout, alors que je suis d'une région voisine. Pendant longtemps, jusqu'à il y a quelques années, peu d'historiens s'étaient penchés sur le sujet, plus intéressés par les souffrances des Poilus. C'est horrible de penser que tous ces civils déportés ont dû vivre avec ces souvenirs extrêmement douloureux sans pouvoir les partager avec le reste de leurs compatriotes. C'est un peu comme si l'Histoire niait ce qu'ils avaient vécu. Je suis choquée que les livres d'histoire de ma scolarité n'y aient jamais fait allusion ! Avec ce témoignage, l'auteure répare un peu cet oubli ! Dommage qu'il n'y ait désormais plus de survivants pour en prendre connaissance.
En tout cas, la lecture a été à la fois très instructive et très intéressante, mais également révoltante pour les traitements inhumains infligés à tous ces civils qui se sont retrouvés au mauvais endroit au mauvais moment. Les carnets et photos de Louise constituent le fil rouge de cet ouvrage, mais l'auteure s'appuie également sur d'autres témoignages lorrains ainsi que les lettres de fonctionnaires français ou allemands.
Et l'on se dit avec tristesse que l'Histoire ne fait que bégayer, car ce témoignage fait écho à d'autres réfugiés, lancés sur les routes à cause de la guerre, déracinés et indésirés, mais cette fois cela se déroule de nos jours...

Merci aux éditions Entre-Temps et à Babelio pour ce partenariat !
(sources : Babelio)

Sylvie Arnoux, née en 1962, est diplômée de l’École Supérieure de Commerce.
Elle a travaillé dans le tourisme et l’édition avant de se consacrer à l’écriture. Elle est auteur de romans et nouvelles, elle écrit également pour les enfants.
Paru aux éditions Kirographaires en octobre 2011, Mamy Grand est son premier roman.
La spécificité de ses publications jeunesse est d’être accessible aux lecteurs dyslexiques.
Sylvie Arnoux réside à Lyon.

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Ma 72ème participation au challenge de Lynnae -
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http://www.livraddict.com/biblio/livre/l-enchanteur-1.html
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jeudi 9 février 2017

Les Mots entre mes mains de Guinevere Glasfurd


http://www.priceminister.com/blog/cest-reparti-pour-les-matchs-de-la-rentree-litteraire-mrl16-16636
"Je fais le tour de sa chambre à  petits pas."
  
Helena Jans van der Strom n’est pas une servante comme les autres. Quand elle arrive à Amsterdam pour travailler chez un libraire anglais, la jeune femme, fascinée par les mots, a appris seule à lire et à écrire. Son indépendance et sa soif de savoir trouveront des échos dans le coeur et l’esprit du philosophe René Descartes. Mais dans ce XVIIe siècle d’ombres et de lumières, leur liaison pourrait les perdre. Descartes est catholique, Helena protestante. Il est philosophe, elle est servante. Quel peut être leur avenir ?

En dévoilant cette relation amoureuse avérée et méconnue, Guinevere Glasfurd dresse le portrait fascinant d’une femme lumineuse, en avance sur son temps, et révèle une autre facette du célèbre philosophe français.
Un roman de passion et de liberté qui nous plonge dans une fresque envoûtante des Pays-Bas au « siècle d’or », à la manière de La Jeune Fille à la perle.

Un premier roman remarquable. Une histoire d’amour qui ne tombe jamais dans le sentimental, portée par une héroïne inoubliable. The Times
Je crois qu'une malédiction à propos de ce livre me poursuit. Lu début novembre dans le cadre des Match de la Rentrée littéraire, je devais rédiger mon avis sous forme de vidéo. Or, ayant déménagé entre-temps et vivant encore dans les cartons, je n'ai pas retrouvé mon appareil pour ce faire. Mon fils m'a donc filmée avec mon téléphone portable qui n'offrait qu'une qualité toute relative. Mais peu importe puisque ce fils adoré, après avoir filmé la 3ème prise et croyant que les deux autres n'étaient plus d'aucune utilité, les a purement et simplement supprimées. Arghhhhhhhhhhhh. J'ai passé des heures sur le net à chercher des tutos pour récupérer les fichiers supprimés, j'ai même débogué mon appareil, mais aucune trace de mes vidéos perdues... Or, ce n'était pas seulement le livre qui était maudit, mais aussi la période, car j'ai eu d'autres problèmes d'ordre personnel... Bref, je dois avouer à ma grande honte que j'en ai un peu oublié le Match de la Rentrée littéraire. Complètement démotivée pour rendre ma copie sous forme de vidéo, je me suis finalement décidée à ce jour à faire un bête article. Qui à son tour a été malheureusement effacé par inadvertance. Arghhhhhhhhhhhhh... Quand je vous disais que ce livre était maudit !
Mais je vais y arriver ! Je vais y arriver....
Mais foin de ces explications futiles et passons maintenant à mon ressenti de lecture...

J'AI TOUT SIMPLEMENT A-DO-RÉ !!!

 
Descartes par Frans Hals
Bizarrement, je ne m'étais jamais imaginée jusqu'ici que Descartes ait pu avoir une vie amoureuse. L'idée même m'aurait paru saugrenue, à contempler son portrait aux traits si austères, si sévères. Et pourtant... Descartes était un homme aussi bien qu'un philosophe... un homme avant même d'être un philosophe. Et lui aussi pouvait éprouver les morsures de la passion.
L'histoire d'amour entre lui et Helena est touchante.
Tout les oppose : leur âge, leur condition sociale, leur religion, leur nationalité. Seul l'amour les réunit. Ou bien est-ce le désir ? Ou l'amour du savoir ? Peut-être au final seulement le goût de leur peau ? Mais ils doivent se cacher pour s'aimer. Toute la vie de Descartes, et donc celle d'Helena, est en effet suspendue à la publication de son Discours. Il l'aime sans aucun doute mais c'est un savant attaché à sa réputation... et en ces temps où la religion impose sa loi, il ne fait pas bon y déroger !
Mais je ne vous en dirai pas plus ! A vous de découvrir ce qu'il advint de leur couple en lisant Les Mots entre mes mains...

Une dernière petite chose : on se sent complètement immergé dans ces Pays-Bas du XVIIème siècle qui méprise tant les femmes et souhaite les maintenir dans l'ignorance. Ce qui n'en rend le personnage d'Helena, sa détermination à s'affranchir de sa condition que plus admirable  !

Pour conclure, une histoire d'amour bouleversante dans un contexte historique superbement reconstitué !

#LesMotsentremesmains #GuinevereGlasfurd #MRL16

PS : je vais tout de même vous révéler l'idée que j'avais eue pour ma vidéo : mon fils avait commencé à me filmer en train d'écrire ma chronique sur mes mains, sur mes bras, sur mes poignets, en référence à un passage du livre, puis j'aurais dû la continuer sur des petits morceaux de papier...  j'avais également retrouvé la musique évoquée par Helena, Ricercar de Sweelinck, que je voulais utiliser en fond sonore...

Guinevere Glasfurd vit dans les Fens, près de Cambridge. Auteur de nouvelles remarquées, elle a obtenu une bourse du Arts Council England pour l'écriture des Mots entre mes mains, son premier roman. Très investie auprès des artistes du Royaume-Uni et d'Afrique du Sud, à travers l'Artist's International Development Fund, elle collabore également avec l'association de femmes écrivains de l'est de l'Angleterre Words and Women.
 
Ma 71ème participation au challenge de Lynnae - rencontre avec Descartes
http://www.priceminister.com/blog/cest-reparti-pour-les-matchs-de-la-rentree-litteraire-mrl16-16636
http://www.livraddict.com/biblio/livre/l-enchanteur-1.html
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mardi 7 février 2017

Les Noces de l'innocence d'Eve Terrellon - Les Dames de Riprole, tome 2

"Pour la seconde fois depuis le mariage de Tristan et d'Isabelle, la petite chapelle débordait de monde."
  
En cette année 1417, alors que l’armée anglaise menace plus que jamais la Normandie, le doux Béranger n’a qu’un rêve : devenir ménestrel. Pour cela, il se sent prêt à braver l’autorité de son frère Arnault, un fier chevalier, au risque de se voir renier par sa famille.
Très loin de là, dans les Vosges, Douce, sauvageonne vivant dans la montagne, voit sa vie bouleversée en portant secours à une fugitive. Réunis contre leur gré, les deux jeunes gens se voient plongés dans l’univers cruel et licencieux du comte de Coeurval.
Confronté au pire, le caractère bien trempé de Douce parviendra-t-il à s’accommoder des façons timorées de Béranger pour échapper aux griffes de leur prédateur ?
J'avais beaucoup aimé le tome 1 qui racontait les mésaventures de la soeur, Isabelle, et même si j'aurais préféré découvrir la destinée du ténébreux et mystérieux frère aîné Arnault plutôt que celle de Béranger, le benjamin de la famille, je ne me suis pas moins ruée vers ce tome-là, histoire de patienter jusqu'à la sortie du suivant ! Je me demandais d'ailleurs comment l'auteure allait développer son intrigue, vu que le caractère doux du jeune héros et le métier de ménestrel pour lequel il se prépare en secret ne le prédestinent guère à une vie mouvementée. Le quotidien de Béranger va pourtant être bouleversé, de la manière la plus brutale qui soit !

Cette suite survient quelques mois après la fin du tome précédent. Thierry est enfin adoubé chevalier  par Tristan, et ajourne le moment de son départ. En effet, il répugne à abandonner Béranger, avec lequel il a noué une profonde amitié, à un moment crucial de son existence, d'autant qu'il est son seul confident et son unique soutien : le choix, encore secret, de Béranger pour le métier de ménestrel, dont l'exercice est considéré comme une dérogeance, pourrait entraîner le reniement de sa propre famille, et surtout celui de son ombrageux frère aîné. En outre, Thierry se méfie de la nouvelle rencontre faite par son ami et qui lui a promis de l'introduire auprès de la cour de France.
Malheureusement, les événements vont se précipiter, jetant Béranger aux mains de personnes peu recommandables...

Je dois dire que j'ai été très agréablement surprise par la tournure des événements : alors que je pensais voir se développer une romance entre deux personnages, l'auteure nous emmène dans la direction opposée. Nous quittons la Normandie pour les Vosges où Béranger est livré au seigneur Hugues de Coeurval, pour lequel l'auteure s'est inspiré de Gilles de Rais. Dans ce château, abandonné à la plus crapuleuse débauche, le jeune homme va rencontrer une jeune fille qui partage son sort : Douce, jeune paysanne ayant vécu durant cinq ans en sauvageonne et déterminée à s'échapper.

Bien que la confiance s'installe un peu trop rapidement au vu de leur situation, j'ai adoré le renversement des rôles entre Douce et Béranger. On a l'impression que c'est Béranger la femme et Douce l'homme. Si au début du livre, Béranger se défend d'être une damoiselle en détresse face aux taquineries de son ami Thierry, c'est ensuite bien ce qu'il est avec Douce, qui semble avoir écopé pour sa part du rôle de preux chevalier ! Ce qui occasionne bien des scènes cocasses, malgré la gravité de la situation ! Car c'est Douce qui est obligée d'encourager Béranger à se rebeller et à le sortir des mauvaises passes où il s'est embourbé.
Ces deux personnages, que tout oppose, sont vraiment attachants : Douce pour son courage et sa détermination, Béranger, malgré un côté boulet très prononcé, pour sa douceur et sa vulnérabilité.
De plus, on a plaisir à retrouver les autres personnages du tome 1, même fugacement : Isabelle et son mari Tristan,  l'irritable et tourmenté Arnault, le fougueux Thierry...


Concernant l'édition, mêmes remarques que pour mon billet précédent : j’ai lu ce livre sous format numérique et il n’y avait pas de "renvoi" aux renvois (il m’a fallu attendre d’arriver à la fin du livre pour les lire). De plus, il reste plusieurs coquilles et fautes de conjugaison.

Une suite très agréable et différente des Dames de Riprole dans laquelle l'auteure a su habilement éviter les redites et renouveler l'intérêt du lecteur, malgré quelque facilité narrative (mais rien qui vienne gâcher la lecture). J'ai maintenant hâte de retrouver Arnault dans L'Epervier de l'Espoir, qui devrait sortir le 15 février. Par contre, je me demande si Eve Terrellon réservera un tome spécial à Thierry, car j'ai à son sujet comme un goût d'inachevé... ^^

Mes autres avis sur la saga : tome 1 ♦ tome 2 ♦ tome 3 ♦
Installée depuis de nombreuses années dans le Berry, Eve Terrellon a d'abord exercé dans le cadre de l'insertion professionnelle avant de créer sa petite entreprise de gardiennage d'animaux. Elle se consacre aujourd'hui pleinement à l'écriture.
En 2013, La Colline de l’oubli, romance traitant de la transsexualité dans un contexte de western historique, et La Petite Fée de Noël, romance plus légère mâtinée de paranormal et de fantasy voient le jour.
https://parthenia27.blogspot.fr/2017/01/challenge-un-genre-par-mois-2017_8.html
Challenge Un genre par mois organisé par Iluze (2/12)

https://parthenia27.blogspot.fr/2016/12/challenge-des-12-themes-organise-par.html
Challenge organisé par A-Little-Bit-Dramatic (2/12)

Meurtres sur le Palatin de Cristina Rodríguez - Une enquête de Kaeso le prétorien, tome 2
Challenge organisé par ZinaLicorneSession 2 : Choisissez dans votre PAL le livre de votre choix ou dans la pal de votre partenaire, au choix !

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Ma 27ème participation au RV de Stephie -

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vendredi 3 février 2017

Mordred de Justine Niogret

"C'était le moment où l'on sale la chair crue, quelques nuits avant la Noël."
Oyez la sinistre et triste histoire de Mordred, le chevalier renégat.

 La légende veut que Mordred, fruit des amours incestueuses d’Arthur et de sa sœur Morgause, soit un traître, un fou, un assassin. Mais ce que l’on appelle trahison ne serait-il pas un sacrifice ?

Alité après une terrible blessure reçue lors d’une joute, Mordred rêve nuit après nuit pour échapper à la douleur. Il rêve de la douceur de son enfance enfuie, du fracas de ses premiers combats, de sa solitude au sein des chevaliers. Et de ses nombreuses heures passées auprès d’Arthur, du difficile apprentissage de son métier des armes et de l’amour filial. Jusqu’à ce que le guérisseur parvienne à le soigner de ses maux, et qu’il puisse enfin accomplir son destin.
La plupart des chevaliers de la Table ronde ont fait l'objet de romans, qu'ils soient médiévaux comme contemporains, mais Mordred, à cause de sa réputation perfide et traîtresse, a été le grand négligé de la littérature. C'est un peu el Desdichado du cycle arthurien... Aussi étais-je très curieuse de découvrir de quelle manière l'auteure allait revisiter cette figure maudite. Et grand bien m'en a pris !

Les deux points forts de ce livre sont l'angle choisi pour raconter la destinée de Mordred et le style de l'auteure, qui, par le choix soigné du vocabulaire et le rythme des phrases, retranscrit la rudesse de cette vie au Moyen-Âge, libérée de toutes les fioritures "romantiques".

Justine Niogret nous dépeint un Mordred solitaire et silencieux, que la maladie et la fièvre plongent en ses souvenirs d'enfance, ses escapades dans la nature brumeuse de l'Avallach, son adoubement par Arthur. Tout cela donne une ambiance empreinte de mélancolie et de tristesse, telle la complainte d'un troubadour, accentuée par le huit-clos. En effet, l'intrigue se déroule essentiellement dans le château du roi, et plus particulièrement la chambre où est alité Mordred. Les personnages se résument donc à Mordred, Arthur, le mire et le mystérieux Polîk, qui semble prendre plaisir à tourmenter le jeune homme, à le pousser vers la tentation, si bien que j'ai longtemps cru - et que je crois encore - que Polîk incarne en fait la conscience de Mordred.
Les autres personnages n'apparaissent que dans les songes ou les souvenirs du chevalier : Morgause, sa mère, et Guenièvre, la tentatrice.

A aucun moment Morgause ou Arthur ne disent le nom du père de Mordred. Peut-être Arthur n'en est-il réellement que l'oncle ? Ou peut-être pas. Certaines allusions nous font pourtant deviner la relation incestueuse, et le fruit qui en a découlé. En tout cas, la seule chose sûre est le profond attachement et l'amour sincère qui lient l'oncle au neveu, le neveu à l'oncle, les rendant très touchants.
Malgré les très grandes qualités littéraires de l'ouvrage, je ressens comme un goût d'inachevé car les raisons qui poussent Mordred à accomplir son destin n'ont pas réussi à me convaincre totalement... Pourtant, l'idée était vraiment intéressante, mais elle a peut-être manqué de développement pour que j'y adhère vraiment.
Néanmoins, j'ai adoré l'approche intimiste de l'auteure : Mordred souffre depuis un an dans ses chairs d'une blessure mal soignée, le confinant dans l'inaction et des délires fiévreux. Il n'a plus que l'introspection et ses souvenirs pour passer le temps. Et tous ses doutes, toutes ses souffrances nous le rendent terriblement proche et humain.

Il faut une victime à toute histoire. Il faut l’argent d’un miroir éteint pour que certains parviennent à voir leur visage. Une chandelle sans nom pour que les scarabées dansent. A tout héros, il faut son reflet. Un perdant pour que les autres gagnent.

Pour conclure, un roman au charme puissant, servi par une écriture très poétique et ciselée. La plume est complètement envoûtante et immersive, et joue sur les ambiguïtés et les non-dits. C'est un livre au rythme contemplatif, jamais ennuyeux, et qui décrit âprement les lieux et les personnages. Une très belle découverte.

Une femme se tenait là, et Mordred voulut réagir ici comme il le faisait avec le monde, lorsque ce monde était humain : l'ignorer. Mais la femme le dévisageait avec tant de volonté qu'il n'y parvint guère.
Il se trouva incapable de dire s'il l'avait déjà vue. Elle avait les yeux presque violets, un bleu de fleur de mauve. Elle le regardait comme on le fait de la chair lorsqu'on a faim, et Mordred se demanda si elle avait cette même colère, cette colère contre la mort à venir, ces destinées sans échappatoires possibles. Elle était envie et brutalité.
(page 88/89)

(source : Mnémos)

Justine Niogret Née dans les années 1980, Justine Niogret est devenue l’une des voix incontournables des littératures françaises de l’imaginaire.
Après avoir écrit quelques nouvelles, c’est avec Chien du heaume, son premier roman, qu’elle est publiée aux Éditions Mnémos en 2009. C’est la révélation et elle enchaîne les prix : Prix Imaginales, Grand Prix de l’Imaginaire – Étonnants Voyageurs, prix des Utopiales et prix Elbakin pour Mordre le bouclier.
Férue de Moyen-Âge, comme en témoigne l’univers âpre et sans merci qu’elle décrit dans ses romans, elle est aussi passionnée d’histoire, de reconstitution, de forge, d’armes blanches, de jeux de rôle et de jeux vidéo.
Remarquée pour sa langue ciselée et percutante, Justine Niogret entraîne le lecteur dans ses mondes à la noirceur lumineuse et à l’onirisme cru.
https://parthenia27.blogspot.fr/2012/10/challenge-legende-arthurienne-propose.html
 Ma 13ème participation au challenge d'Aethelthryth.

Challenge Moyen-Âge par hérisson
Ma 18ème participation au challenge d'Hérisson -

https://parthenia27.blogspot.fr/2016/12/challenge-de-l-organise-par-amaruel-5e_25.html
Challenge Littérature de l'Imaginaire organisé par Amarüel (3/24)

Challenge "ABC 2017 - Littératures de l'imaginaire..." organisé par Mariejuliet
 
Ma 1ère participation au challenge de Mariejuliet -
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